Cala Figuera

10 janvier 2012

Temps de lecture : 5 minutes

Maria Dolors Camos – texte / text
Histoire écrite en français et en catalan / Story written in French and Catalan

C’était un jour éclatant de soleil. Je suis arrivée sur l’île vers six heures du soir, à “l’heure basse”, comme on dit aux Baléares.
Qu’est-ce qui se produit en moi dès le moment oú j’écoutai parler le dialecte majorquin que j’ai tant aimé? Ce fut à partir de sons bien précis que des petits souvenirs vécus il y a fort longtemps envaissaient de nouveau mon corps, en me rappellant ce qui avait était pendant quelque temps le centre de mon existance.
Depuis la petite terrasse de la chambre en haut de l’hôtel de Palma, mon regard glissait sur les toits qui descendent peu à peu jusqu’à l’église de Sant François, où reposent les restes de Ramon Llull, le grand écrivain catalan, né sur l’île entre 1232-1235. Le lendemain matin je verrais sa statue dans lequelle il tient un livre dans sa main, un livre ouvert à l’espace immense de la mer, et je me souviendrai qu’à l’èpoque il était en butte à l’incompréhension et à l’hostilité.
J’ai l’impression que bien avant sa figure, ce furent trois vers écrits dans la pierre que je vis en premier, comme si quelques marques langagières c’étaient dejà inscrits en moi depuis des années.
Un tout petit mot d’entre eux ressourgissait en force: p-o-r-t. Je me suis un peu inquiétée, sans savoir la raison. Soudain, un nom m’emportait vers un bell endroit, pas très loin de Palma: Cale Figuier (Cala Figuera).
Il y avait des tournants dans la route. Tout en descendant, mes pas hâtaient au rythme du coeur. L’entrée de la mer dans cette large rue qui constitue le port arrivait jusqu’à frapper à la porte des petites maisons à coté. Quelques barques de pêche se balancaient doucement sur l’eau completement en calme.
Je m’assis dans une petite table au manteau blanc près de la mer, en attendant que quelqu’un vienne pour que je fasse la commande. Ce fut alors que mon regard retrouva celui de l’homme qui était devant la porte du restaurant. Il se teni tranquille, en fumant et en s’apuyant sur le mur. Il me souriait du coeur. Il sufit une millième de seconde pour que je réagisse: son hauteur et sa gueule de métèque étaient encore dans un petit coin de ma peau. Tout d’en coup j’entendu sa voie revenir. À tel point que des souvenirs de bien-être decoulaient derrière elle.
Il était né en Cuba et nous avions fait la connaissance il y a quelques annés, dans une rencontre très émouvante dont le titre était “l’avenir sociopolitique en Cuba” qui se deroulait pendant trois jours à Majorque. On a beaucoup parlé, on a discuté… et peu à peu le silenci à venir nous aider, nous apaiser. Après on s’a aimé. Nous ne sommes pas quittés qu’après deux ans de vivre ensemble.
Et nous voici, un à coté de l’autre, dans cet angle du monde qui a la forme d’un port, le plus petit de toute la Mediterranée, aussi sauvage et beau comme il devait l’être à l’aube du temps. Quatre bouées lumineuses étaient les uniques traces à l’air de notre èpoque.
Je vennait de connaître qu’il vivait dans cette rue à coté de la mer, où il avait acheté le petit restaurant où nous étions. Depuis qu’il était venu de petit avec ses grands parents, il n’avait jamais quité l’îlle. Quel bonheur pour lui de partager son temps entre Palma et Cale Figuier! Mais, qu’est-ce qu’il faisait maintenant? S’était-il marrié? J’avais autant de questions à lui poser. Par contre, ce que j’arrivé presque à balbutiai ce fut une phrase que je lui avait dit une fois: Avec toi, j’avais trouvé ma voie, retrouvé ma voix.
Et alors je fus fort attirée par le plat annoncé sur la porte: des artichauts au paté. Tout en mangeant, je ne savais pas ce qui ressurgissait en premier de ce bonheur que j’éprouvais, si c’étaient les artichauts ou le pâté, ou bien le pain de l’île que j’adore depuis ma tendre enfance. Ou tout simplement s’agissait-il du conjoint. Peut- on compartimenter les saveurs, et même exclure le context émotif dans lequel un diner à lieu? Et surtout, peut-on oublier la première voix, le seule qui compte dans la vie?
Je n’ai pas de formules pour garder le petit secret de cette nuit là, mais seulement mon écriture pour ne pas l’oublier.

Texte en catalan / Text in Catalan

Era un dia de sol esclatant. Havia arribat a l’illa cap a les sis de la tarda, a s’horabaixa, que diuen a les Balears.
Què em va passar en el moment de sentir parlar el dialecte mallorquí que jo tant havia estimat? Fou a partir de sons ben precisos que petits records viscuts fa molt temps m’envairen el cos, recordant-me allò que havia estat durant temps el centre de la meva existència.
Des de la petita terrassa de l’habitació de l’hotel de Palma, els ulls rossolaren per les teulades que baixen poc a poc fins a l’església de Sant Francesc, on reposen les restes de Ramn Llull, el gran escriptor català nascut a l’illa vers el 1232. L’endemà al matí veuria la seva estàtua, amb un llibre obert a la mà, un llibre obert a l’espai immens de la mar, i em recordaría que a la seva época va estar sotmès a la incomprensió i a l’hostilitat.
Recordo bé que abans de veure la seva figura foren els versos escrits damunt la pedra allò que va cridar la meva atenció. Com si algunes marques llenguatgeres estessin inscrites a dins meu d’anys ençà.
Quatre lletres ressorgiren amb força del conjunt: port. Fou aleshores que em vaig sentir una mica inquieta, sense saber-ne la raó. De sobte, un nom m’arrastrà cap a un petit port, no gaire lluny de Palma, “Cala Figuera”.
La carretera feia baixada. A mesura que caminava, les passes s’acceleraven a ritme del cor. L’entrada del mar en aquella mena de carrer llarg que constituïa el port arribava fins a trucar a la porta de les petites cases que hi havia a cada costat. Esparses barques de pesca es balancejaven dolçament en l’aigua d’aquella tarda.
Em vaig asseure en una petita taula amb estovalles blanques que hi havia just a tocar del mar, esperant que vingués algú a prendre la comanda. Va ser en aquell moment que la meva mirada va trobar la de l’home que hi havia davant la porta del restaurant. Fumava, tranquil, tot recolzant el cos en un costat de paret.
Amb una milèssima de segon em vaig tenir prou per reaccionar. La seva alçada i la seva cara de mètec eren encara en un petit racó de la meva pell. De cop, vaig sentir la seva veu. De tal manera, que bells records darrere seu s’anaven enfilant.
Havia nascut a Cuba. Ens havíem conegut fa anys en un encontre molt interessant que, amb el títol “El futur sociopolític a Cuba” es va desenrotllar durant tres dies a Palma. Vam parlar molt, també vam discutir. I poc a poc, el silenci va venir a ajudar-nos, a apaivagar-nos. Després, ens vam estimar. Quan feia dos anys que vivíem junts ens vam separar.
I ara érem aquí, un al costat de l’altre, en un petit angle del món en forma de port, el més petit de la Mediterrània. I tan salvatge i bell com ho devia ser a l’alba del temps. Quatre boies il.luminades eren els únics rastres del món d’avui.
Acabava de saber que vivía al port, on havia comprat el petit restaurant on estàvem asseguts. Així, que sempre havia viscut a l’illa, des que de petit hi havia vingut a viure amb els seus avis. Què feia? S’havia casat? Hi havia tantes coses que em venien de preguntar-li! No obstant, el que vaig arribar a balbocejar foren uns mots, una frase que li havia dit una vegada: Avec toi, j’avais trouvé ma voie, retrouvé ma voix.
Vaig llegir el plat que hi havia anunciat a la porta: escarxofes amb paté. Tot menjant, no sabia pas què era allò que produïa aquell benestar que experimentava. Si eren les carxofes o el paté, o bé el pa de l’illa que ado